Accueil > Brèves > Belgique : Arrestations de Kurdes, ou comment des réfugiés politiques sont (...)

Version imprimable de cet article Version imprimable

Belgique : Arrestations de Kurdes, ou comment des réfugiés politiques sont poursuivis pour terrorisme

vendredi 5 mars 2010

Vingt-huit perquisitions, vingt arrestations, une chaîne de télévision mise sous scellés : l’enquête initiée par le Parquet fédéral il y a trois ans, et confiée à des juges d’instruction de Charleroi et de Bruxelles est apparue au grand jour hier. Au petit matin, 300 (!) policiers fédéraux ont débarqué au domicile d’une vingtaine de personnes, ainsi qu’au siège belge de la télévision kurde, Roj TV.
Vingt-quatre heures après ces interpellations musclées, les juges d’instruction bruxellois et carolo ont décerné huit mandats d’arrêt. Les Kurdes arrêtés sont inculpés pour avoir pris part aux "activités d’un groupe terroriste".
Parmi les personnes interpellées figurent deux anciens députés kurdes, Zubeyir Aydar et Remzi Kartal, qui se trouvent en Belgique en tant que réfugiés politiques.

"Participation aux activités d’un groupe terroriste" veut dire dans le cas présent que les personnes inculpées auraient, selon le Parquet fédéral, participé au recrutement de volontaires au départ dans des camps d’entraînement du PKK qui seraient situés en Irak et en Grèce.

Les pourparlers au sujet de la répression des mouvements kurdes avaient déjà débuté lors d’une visite du président de la République de Turquie, Abdullah Gül, au Roi Albert II à Bruxelles en mars 2009.

Tout récemment lors d’une visite non-médiatisée à Ankara, le premier ministre belge Yves Leterme a promis aux dirigeants turcs une collaboration étroite des polices belge et turque pour museler toute opposition kurde en Belgique, notamment les émissions de la Roj TV.

Finalement, le nouvel ambassadeur turc en Belgique, Murat Ersavci, a été reçu à Bruxelles par le ministre de la Justice Stefan de Clerck et le premier ministre Yves Leterme pour une opération répressive contre la Roj TV ainsi que les institution kurdes situées en Belgique.

Le PKK est une organisation classée "terroriste" par la Turquie,
l’Union européenne et les Etats-Unis.

La justice belge avait déjà tenté de poursuivre des militants kurdes présumés au milieu des années 1990. Les chefs d’inculpations étaient blanchiment d’argent, faux en écriture, détention illégale d’armes et embauches de clandestins. Mais il y eut prescription, onze ans après le début de l’instruction.

Des questions importantes sont posées par ces arrestations. La première est : quel est le marché "occulte" conclu entre la Belgique (ou l’Union européenne) et la Turquie, pour que ces poursuites aient lieu ? La deuxième est : quels sont les critères "occultes" qui président à l’intégration de tel ou tel groupe politique dans la liste des organisations terroristes de l’Union européenne(ou des Etats-Unis) ? La troisième est : est-il encore possible d’être un militant de lutte pour la libération nationale dans le monde dans lequel nous vivons ?

Comble de l’ironie : la Cour européenne des Droits de l’Homme avait condamné l’Etat turc pour torture systématique de dissidents, à l’encontre de Mr Kartal, une des personnes arrêtée hier, et poursuivi en tant que cerveau de l’organisation "terroriste" en Belgique.

Voir à propos des lois antiterroristes nos articles dans le numéro 1 de JIM, dont Pour mieux comprendre les lois antiterroristes

Source : Belga et AFP, 4 et 5 mars 2010, avec l’association Peace in Kurdistan

SPIP | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0