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Chronique culturelle

The Toxic Avenger : film nanard-chiste de Troma production

mardi 27 octobre 2009, par Gérard Craan

Film d’horreur nullissime, The Toxic Avenger a été réalisé en 1985 par Lloyd Kaufman et Michael Herz. Le suspens y est inexistant, les effets spéciaux déplorables, les acteurs catastrophiques, la bande-son pourrie, le scénario prévisible. Pourtant The Toxic Avenger est une perle du cinéma.

L’intelligence, si l’on peut dire, de ce film ne réside pas dans les codes hollywoodiens classiques mais bien dans leur détournement par la parodie absurde et poussée à l’extrême. C’est ainsi que le héros, nettoyeur de son état, se trouve victime d’une très mauvaise blague. Plongé dans une cuve de produits chimiques verdâtres, Melvin se transforme en monstre justicier de sa cité, Tromaville. The Toxic Avenger nous donne alors l’occasion de voir l’œuvre de vengeance et de justice de notre super-héros : les méchants sont châtiés, les petits enfants sauvés et même l’armée s’attendrit.


The Toxic Avenger sauve des enfants


The Toxic Avenger trouve l’amour à Tromaville sur fond… new-yorkais d’où se détachent les twin towers

Parallèlement, Melvin trouve l’amour, le vrai, auprès d’une aveugle évidemment inconsciente du physique musculeux mais horrifiant de son Adonis.

La trame du film est méchamment alourdie de bastons ratées contre des criminels évidemment gratuitement cruels, grimés à la orange mécanique ou encore spécialistes des arts martiaux et du nunchaku.


Comble du kitsh,
Melvin, déjà monstre et rejeté par sa mouman, trouve refuge dans la décharge toxique et y accroche le portrait de sa mère adorée.

Les ingrédients stéréotypés constituent une soupe tellement indigeste qu’on ne peut qu’en rire et s’interroger sur notre consumérisme visuel et ce que le cinéma nous impose en masse. C’est le premier objectif des réalisateurs déjantés des films Troma.

Mais Kaufman et Herz ne s’arrêtent pas en si bon chemin. En arrière-plan de la critique de l’industrie hollywoodienne se placent des préoccupations très contemporaines et globales : société de consommation et du paraître, collusion entre politique et gros business, angoisse du nucléaire et de ses déchets ainsi que, de manière plus générale, de la pollution. Bref, c’est le capitalisme qui est visé. Et de préférence à l’artillerie lourde plutôt qu’au filet à papillons
C’est ainsi que la première phrase du film, en voix off, évoque New York, capitale du monde du commerce, de l’industrie et de la pollution. Ici dans des hauts buildings des hommes bâtissent la civilisation de demain.
L’histoire se déroule autour du club de fitness, où Melvin travaille. On peut y voir de jeunes garçons et filles, tous musclés, beaux et bronzés [1]. Mais dans les coulisses, ce sont de vrais salopards, certains achètent leur came à l’adjoint de mairie (on parlait d’artillerie lourde, n’est-ce pas) tandis que d’autres font des concours automobiles avec pour objectif d’écraser un maximum de victimes [2].

Le maire conclut un contrat

De son côté la figure du maire est elle aussi une critique féroce de notre société. Quasi constamment entouré de stripteaseuses, il est à la tête de la pègre locale. Une scène le montre entouré de stripteaseuses en train de pactiser avec un grand patron au sujet de l’installation d’une nouvelle décharge de déchets chimiques… à 20 mètres du réservoir en eau de la ville.

Paradoxe flagrant de jeunes sportifs soignant superficiellement leur corps mais cérébralement inaptes à comprendre de quelle manière leur santé est mise en jeu.

A l’instar des autres films de Troma Entertainment, il ne faut pour autant pas voir dans The Toxic Avenger, une critique constructive du capitalisme. Les réalisateurs avaient a priori pour objectif de s’amuser et d’inscrire leur démarche dans un cinéma réellement indépendant.



Gérard Craan


Pour en savoir plus sur les productions Troma :
- le site de Troma Entertainment
- la liste de diffusion vidéo de Troma Entertainment sur You Tube
- une interview de Lloyd Kaufman
- enfin, quelques-uns des films Troma sont disponibles à la Médiathèque

    Notes

    [1A l’exception notoire d’une obèse, ce qui ne la dispense pas de comportements semblables aux autres

    [2Thème récurrent, l’écrasement de piétons est repris par nombre de jeux vidéos (Carmaggedon, par exemple) et trouve son origine dans le film Death Race 2000.

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